Ce n'est pas sur le thème des "valeurs" ni sur leur programme économique que les démocrates se sont démarqués. "La défaite des républicains est perçue aux Etats-Unis comme un désaveu de la politique de George Bush en Irak. Le président a lui-même donné du crédit à cette lecture en remplaçant dès mercredi son secrétaire à la défense, Donald Rumsfeld, par l'ancien directeur de la CIA Robert Gates" (Le Monde, 09-11-06).
Mais ce "désaveu" ne signifie pas que le retrait est proche, car il ne porte que sur les modalités de la guerre. Les démocrates ne sont pas opposés à la guerre en Irak. Encore moins à celle d'Afghanistan.
Durant la campagne, Clinton a d'ailleurs passé son temps à jouer les va-t-en-guerre. Dans un entretien accordé à Chris Wallace, journaliste de Fox News, il a rappelé que les démocrates étaient "à cent pour cent pour les actions en Afghanistan". Il a même affirmé: « Après [l’attentat à la bombe du destroyer américain] Cole, j’ai planifié d'aller en Afghanistan, de renverser les talibans et de lancer une attaque à grande échelle pour trouver ben Laden. » Après avoir expliqué pourquoi il n'a pas pu le faire, Clinton a continué en déclarant : « Si j’étais toujours président, nous aurions plus que 20 000 soldats là-bas pour tuer [Oussama ben Laden] » .Opinion partagée par le candidat malheureux à la présidentielle, John Kerry. Dans un commentaire rédigé pour la page éditoriale du Wall Street Journal, il regrette l'opposition grandissante à l'occupation américaine de l'Afghanistan, et déclare: « Nous devons modifier notre trajectoire, en commençant par le déploiement immédiat d'au moins 5000 soldats américains de plus. »

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Dans le Connecticut, le sénateur démocrate Joe Lieberman mise sur les voix républicaines
LE MONDE | 02.11.06 | 14h35 • Mis à jour le 02.11.06 | 14h35
NEW YORK CORRESPONDANT
Il y a moins de trois mois, la carrière politique du sénateur démocrate Joe Lieberman, ancien candidat à la vice-présidence en 2000, semblait terminée. Elu du Connecticut depuis dix-huit ans, il venait de subir une défaite humiliante lors des "primaires" du Parti démocrate, contre l'homme d'affaires Ned Lamont, qui dénonçait son soutien à la guerre en Irak et sa proximité avec l'administration Bush. Les dirigeants du Parti démocrate, ralliés à Ned Lamont, avaient alors demandé à Joe Lieberman de se retirer. Il avait refusé et s'était lancé dans la campagne comme indépendant.
Dénoncé comme un "traître" par ses anciens amis, Joe Lieberman, 64 ans, a aujourd'hui de grandes chances d'être réélu. Selon un sondage récent de l'université Quinnipiac, il compte 17 points d'avance sur Ned Lamont. Si Joe Lieberman l'emporte, ce ne sera pas avec le soutien des électeurs démocrates - la majorité d'entre eux votera pour Ned Lamont - mais avec celui des indépendants et des républicains, qui le préfèrent à leur propre candidat, empêtré dans un scandale. Le Parti républicain a en effet fait un cadeau à Joe Lieberman en désignant comme candidat Alan Schlesinger, maire de la ville de Derby, dont la campagne a dérapé, en juillet, quand la presse a révélé qu'il avait été poursuivi pour dettes de jeu impayées dans des casinos et qu'il continuait à jouer sous la fausse identité d'"Alan Gold".
SIGNAL CLAIR
Le sondage réalisé par l'université Quinnipiac montre que M. Lieberman est soutenu par pas moins de 70 % des républicains. La semaine dernière, le vice-président Dick Cheney, lors d'un entretien à la radio, s'est même laissé aller à faire des compliments au sénateur du Connecticut - "Un grand soutien dans la guerre mondiale contre la terreur" - avant de poursuivre : "Je ne veux pas nuire à ses chances d'être réélu. Je n'ai rien à dire sur sa campagne électorale." Le signal envoyé aux électeurs républicains est clair.
Les études d'opinion montrent que, si le message antiguerre de Ned Lamont lui a permis de gagner la "primaire" démocrate du 8 août, en a fait un héros de la gauche américaine et lui a valu le soutien de personnalités comme John Kerry ou Barack Obama et l'appui du New York Times, il n'est pas suffisant pour convaincre les indécis.
"Il n'arrive pas à aller au-delà de la base démocrate", explique Howard Reiter, président du département de sciences politiques de l'université du Connecticut. Les électeurs qui considèrent l'Irak comme le principal enjeu de la campagne votent très largement pour Ned Lamont, mais ceux plus préoccupés par les problèmes de santé ou d'emploi choisissent le sortant.
"L'image du Connecticut est celle d'un "Etat bleu", profondément démocrate, et tout le monde imaginait une victoire facile pour Ned Lamont. Mais nous avons des gouverneurs républicains depuis des années, et trois de nos cinq membres du Congrès sont républicains", souligne Douglas Schwartz, responsable des sondages de Quinnipiac.
"ETABLIR DES PASSERELLES"
Avec l'aide matérielle et morale de Michael Bloomberg, le maire de New York, républicain mais qui, dans une ville majoritairement démocrate, essaye lui aussi de "construire des ponts" entre les deux partis, Joe Lieberman mène une campagne efficace pour attirer les votes modérés. Il joue sur son expérience, présente son riche adversaire, fondateur d'un réseau de télévision par câble, comme un "néophyte" et un "dilettante" qui sera incapable d'obtenir quoi que ce soit à Washington.
Présent depuis près de quarante ans dans la vie politique du Connecticut, d'abord élu local puis ancien ministre de la justice de l'Etat et finalement sénateur, Joe Lieberman a eu le temps de construire des réseaux. Ainsi, en dépit des pressions démocrates, les syndicats de la police et des pompiers de l'Etat lui ont-ils apporté leur soutien. "Je ne fais pas quelque chose de conventionnel. J'ai décidé de continuer la bataille après la "primaire" parce que je crois profondément que je peux faire plus pour l'Etat et le pays que les autres candidats. Je me bats pour que les choses changent à Washington. Il y a trop d'affrontements partisans et pas assez de volonté de vraiment résoudre les problèmes", répète Joe Lieberman dans ses réunions électorales.
M. Lieberman affirme ne pas avoir de rancoeur contre les démocrates. Mais sa revanche pourrait être totale si le scrutin du 7 novembre est aussi serré qu'attendu et si la majorité au Sénat se joue à un siège, celui d'un indépendant... le sien. Joe Lieberman déclare qu'il ne changera pas de parti. Mais il entend toujours "établir des passerelles. J'ai de nombreux amis de l'autre côté. Une grande partie de ce que j'ai fait pour le Connecticut n'aurait pas été possible sans ces relations".
Eric Leser
Article paru dans l'édition du 03.11.06
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