30.8.06

Des journalistes à la botte de Sarkozy

Cinq exemples récents de la servitude médiatique nous donnent un avant-goût d'une campagne Présidentielle très disciplinée:

1/ Lorsque l’émission 7 à 8 diffuse une provocation policière envers des jeunes (TF1, 06-11-05), Robert Namias, directeur d’information de la chaîne, passe un savon aux responsables de l’émission… qui se sentent obligés, le dimanche suivant, de contrebalancer avec les entretiens de maires des banlieues en ébullition.

2/ Lorsque la représentante d’une association souligne la responsabilité de Sarkozy dans les émeutes (Canal+, 08-11-05), celui-ci fait demander la cassette. Résultat : la direction de Canal+ exige "un autre point de vue". Ce sera celui d’un maire UMP (voir ci-dessous!*).

3/ Lorsque Sarkozy est invité au Grand Journal de Michel Denisot (Canal +), il accepte à condition de figurer aux côtés de Denisot en couverture de TV Mag, le supplément télé de la Socpresse (propriété de Dassault) distribué avec 42 quotidiens. Commentaire d’un cadre de Canal + : " Sarkozy n’en à rien à faire du Grand Journal, ce qui l’intéresse, c’est d’être sur la table du salon de 5 millions de personnes " (source: Libération du 27/06/06). Lucide (sauf qu’il s’agit de 5 millions de foyers !).

4/ Lorsque J-P Elkabbach, directeur d’Europe 1, recherche un nouveau journaliste politique, il demande conseil à… Nicolas Sarkozy ! "C’est normal affirme celui-ci. J’ai été ministre de la communication". Je les connais, les journalistes. Il est même inutile de démentir les informations du Canard Enchainé. Puisqu’on vous dit qu’il a été Ministre de la Vérité, puisqu’on vous dit que les journalistes sont ses amis, c’est qu’il s’y connaît. Puisqu’on vous dit qu’il est Ministre de l’Intérieur, c’est qu’il fait régner l’ordre. Quel ordre ? Circulez…

5/ Lorsque Noah déclare à Paris-Match, dans un entretien titré " Mes quatre vérités à la France " (15-12-05) : " Une chôse est sûre : si jamais Sarkozy passe, je me casse ! ", la phrase est tout simplement censurée (source : Le Canard Enchaîné). Un véritable émeutier ce Noah...

Conclusion : Et que se passe-t-il lorsqu’ils ne sont pas assez dociles ? Car cela leur arrive de déplaire à Sarkozy. Pas pour avoir fustigé les cadeaux accordés aux plus nantis lors de son séjour au Ministère de l’économie, ni même pour avoir dénoncé la politique répressive de l’actuel Ministre de l’Intérieur. Non, de ce côté-là, Sarkozy peut être tranquille. Mais Paris-Match s'est rendu coupable d'avoir fait sa couverture sur les infidélités de Cecilia. Sarkozy demande à Lagardère de virer le patron de Paris-Match. Rien de moins. Le groupe Hachette Filipacchi Médias (HFM) évince alors Alain Genestar. Bon, on ne va certainement pas pleurer sur le sort du patron. Mais les journalistes qui travaillent pour ce torchon sont presque touchants: " nous demandons aux instances dirigeantes du groupe HFM de nous donner une garantie ferme et absolue de notre indépendance. Cela afin que ce fait sans précédent ne se renouvelle plus ". Autant pisser dans un violon…

* Dans cette émission (Nous ne sommes pas des anges), Eric Raoult avait déclaré au sujet de l'association « Ni putes ni soumises » que les filles ne doivent certes pas être soumises mais ne pas être non plus comme la première catégorie. Il affirme d'ailleurs dans un entretien accordé à LCI.net : “Les viols et les tournantes ne se passent pas par moins 30° mais surtout quand il fait chaud et quand un certain nombre de petites jeunes filles ont pu laisser croire des choses.” Bref, pour Raoult: pas de fumée sans feu. Pas de viol sans pute. Quand je lis ces paroles immondes je pense à une chanson de circonstance (écouter un extrait mp3 ou le titre intégral Wma):

... Et la roue tournera
Comme tourne la vie.
Mon couteau s'en ira
Faire de la poésie.

Au temps des roses rouges,
Mon gant sera de fer,
Sur une main de chair,
Et ça leur fera drôle.
Au temps des roses rouges,
De lâcher leur monopole,
En gueulant de travers
D'inutiles Pater.

10.8.06

Deux textes sur l'agression israelienne contre le Liban

1/ Extrait d'une déclaration commune de la LCR et du PCL (29/07/06):

L’État d’Israël a engagé une agression de grande envergure contre le Liban. On dénombre déjà des centaines de morts et des milliers de blessés, tandis que l’infrastructure du pays se trouve complètement anéantie.

La communauté internationale (notamment le Conseil de sécurité, les Etats-Unis et l’Union européenne) justifie cette agression barbare en vertu d’un droit de « légitime défense » d’Israël. Des délégations internationales se succèdent même à Beyrouth pour tenter d’imposer au gouvernement libanais, outre la libération des soldats israéliens capturés par la résistance libanaise, le déploiement d’une force militaire internationale au sud du Liban et l’application de la résolution 1559 du Conseil de sécurité.

Or, que préconise la résolution 1559 ? Elle exige le désarmement de toutes les « milices libanaises » (terme dont on baptise les mouvements de résistance libanais), le désarmement de toutes les organisations palestiniennes au Liban et le déploiement de l’armée libanaise officielle dans le sud du pays. Ce que ce texte, en revanche, ne mentionne pas, ce sont les fermes de Chebaa et les collines de Kfarchouba toujours occupées par Israël, les détenus libanais dans les prisons israéliennes (dont Samir Quntar emprisonné depuis 28 ans), ou le droit de retour des réfugiés palestiniens (droit pourtant garanti par les résolutions 194 et 242 des Nations unies).

En conditionnant tout cessez-le-feu à l’application de la résolution 1559, les dirigeants israéliens, l’administration américaine et les principaux gouvernements de l’Union européenne révèlent l’objectif véritable de l’agression en cours contre le Liban. Ils veulent imposer l’arrêt définitif de toute forme de résistance face à Israël, forcer le peuple libanais à renoncer aux territoires qu’Israël occupe toujours, faire oublier les détenus dans les prisons israéliennes [...]


2/ Extrait de Débat Militant (n°115), bulletin d'un courant de la LCR:

[...] "Israël a le droit de se défendre", a répété Bush, toute nation
doit se défendre contre des attaques terroristes. C’est une nécessité du XXIéme siècle
."
Israël aurait le droit de se défendre mais pas les Palestiniens dont il nie le droit le plus élémentaire d’avoir une terre pour vivre.
Certes les attentats contre les civils prônés par les mouvements réactionnaires du Hamas ou du Hezbollah sont inacceptables et se retournent contre le peuple palestinien lui-même. Mais que dire de ce terrorisme d’Etat qui massacre les populations civiles, détruit les maisons ou les installations indispensables à la vie quotidienne.
Quel cynisme, quelle veulerie, que de justifier ce terrorisme d’Etat en dénonçant le combat désespéré des opprimés.

Les provocations ont été le fait d’Israël : 138 civils palestiniens, dont plusieurs dizaines d’enfants, ont été assassinés par les forces d’occupation au cours du mois de juin. Une telle escalade meurtrière ne pouvait pas rester sans réponse. Ce fut l’enlèvement le 25 juin du soldat Gilat Shalit.

Israël s’est refusé à toute négociation. Pire, son armée a arrêté un tiers des ministres du gouvernement palestinien, détruit des centrales électriques et des conduites d’eau potable. Cette escalade militaire ne pouvait qu’entraîner une réaction du Hezbollah. Ce fut le raid qui fit 8 morts du côté israélien et la capture de deux soldats.

Vengeance, crie aussitôt Israël, lui qui détient, hors de tout droit, près de 10 000 prisonniers palestiniens et 2000 libanais.

Quoi que l’on pense par ailleurs de la politique des forces intégristes et religieuses, leur volonté d’obtenir en échange des soldats israéliens la libération de prisonniers palestiniens est pleinement légitime.
Le refus d’Isarël est dans la logique même de sa politique terroriste : nier aux Palestiniens le droit de se défendre parce qu’il nie leur droit élémentaire à avoir une terre pour vivre en paix. Il est pris dans l’engrenage sans fin de la loi du plus fort, obligeant le peuple palestinien à se soumettre à l’humiliation quotidienne de sa domination.

Tant que cette politique durera, il ne peut y avoir de « processus de paix ». Les négociations ne sont que l’occasion d’imposer de nouvelles concessions aux Palestiniens qui, aussitôt, servent de points d’appui pour une nouvelle offensive. C’est ce qui se passe une nouvelle fois, aujourd’hui. Et c’est cette politique d’oppression, d’humiliation qui pousse au désespoir du terrorisme et crée un terrain favorable aux intégristes
religieux qu’Israël prétend combattre.

L’intégrisme islamiste est le complément de la politique de l’Etat religieux d’Israël en l’absence d’une intervention consciente d’un mouvement ouvrier démocratique. Celui-ci a été laminé par les politiques combinées des anciens partis staliniens et des nationalistes bourgeois.

Seule cette intervention consciente pourrait être en mesure d’offrir aux peuples une politique leur permettant d’unir leurs forces pour rompre la logique infernale du terrorisme et de la guerre en se retournant contre ceux qui les dominent, les oppriment et les embrigadent, chacun au nom de son dieu, comme au Moyen-âge.

« Il est urgent que la communauté internationale agisse pour faire la différence sur le terrain », a déclaré Kofi Anan, souhaitant la mise sur pied d’un contingent doté d’un « concept opérationnel et des capacités différentes ». « Je compte sur des contributions de pays européens et d’autres régions », a-t-il insisté pour préciser : « cette force sera plus importante, telle que je l’imagine, bien plus importante que la force de 2 000 hommes que nous avons là-bas ». Le mandat de la Finul (Force intérimaire des Nations unies au
Liban) expire le 31 juillet. Il est possible que l’ONU se propose pour faire la police au Sud-Liban après que l’armée israélienne aura accompli sa sale besogne. C’est la politique que soutient dès aujourd’hui la France, la droite et la gauche, en demandant le déploiement d’une force internationale au Liban sud, à la frontière avec Israël, force qui devrait avoir, selon Chirac, des « moyens de coercition ». Il semble aussi que ce soit le choix d’Israël que de laisser à l’ONU le soin d’occuper le Sud-Liban pour ne pas se piéger comme après
1982 dans une nouvelle occupation.

Une telle politique prétend « sauver le Liban », si cher à Chirac, elle viserait surtout à l’associer, de gré ou de force, à la stratégie des USA et de son allié dans la perspective de construire un grand Moyen Orient entièrement soumis aux intérêts impérialistes.

Quels que soient les enchaînements à venir de la guerre, l’ONU semble vouloir aller plus avant dans l’alignement sur la politique américaine. Cette évolution est inscrite dans l’évolution politique internationale et rend encore plus dérisoires les vains appels à l’ONU ou à l’Union européenne. Ces dernières sont en fait alignées sur les positions de Bush, leurs dernières réticences sont en train de tomber d’autant que Bush pourrait bien laisser à l’Europe le soin d’assumer l’essentiel d’une éventuelle force d’interposition.

Les institutions internationales sont entièrement soumises à la défense des intérêts des grandes puissances, la seule pression pacifique et démocratique ne peut venir que des peuples eux-mêmes.
Dans les plans et calculs des dirigeants qui veillent à perpétuer leur domination, le sort du peuple israélien ne compte guère. Ils méprisent tout autant son droit à vivre en paix et en coopération avec ses voisins que celui des Palestiniens. Pour Bush et ses alliés, le peuple israélien est condamné à être un peuple guerrier pour des intérêts qui ne sont pas les siens, qui lui sont contraires et opposés.
La libre concurrence capitaliste s’impose par la force des armées, au mépris des peuples.
Une paix démocratique au Moyen-Orient ne sera possible qu’en brisant la tutelle des grandes puissances pour que les peuples reprennent aux armées le droit de décider de leur sort.
Cela ne saurait être la seule affaire des peuples du Moyen-Orient mais celle aussi des peuples dont les dirigeants participent à la domination du monde. Vivant au coeur d’une vieille nation coloniale toujours avide de prendre sa place au festin des puissants, nous sommes concernés au premier chef.

Halte à l’agression israélienne, solidarité internationale !