14.7.09

Pure démagogie

Le rappeur Orelsan dit: "Je veux donc que le ministre de la culture se prononce sur le sujet, c'est son job. Quitte à ce qu'il me dise une bonne fois pour toutes que je suis interdit de scène en France".
Et le nouveau Ministre s'exécute, sans doute désireux de montrer qu'il fait son job.
Frédéric Mitterand "se prononce" donc au sujet de la prose du rappeur: "Orelsan exprime le dépit amoureux, avec des termes qui ne sont pas les miens, moi je ne parle pas exactement la même langue, mais il a tout à fait le droit de l'exprimer. Je ne trouve rien de choquant ni de répréhensible à la manière dont il le chante"

Au rappeur fantasmant une "interdiction de scène en France", le Ministre a donc répondu : tu as "tout à fait le droit" de chanter. Mais il n'en reste pas là. Non, Frédéric Mitterand ajoute: tu as ton style qui n'est pas le mien mais bon, il n'y a vraiment "rien de choquant" à la façon dont tu traites le dépit amoureux.

Aperçu du style en question:
"On verra comment tu fais la belle avec une jambe cassée. On verra comment tu suces quand j'te déboiterais la mâchoire. T'es juste une truie tu mérites ta place à l'abattoir. T'es juste un démon déguisé en femme j'veux te voir brisée en larmes."

"Rien de choquant", vraiment?

"Tu m'as trompé tu l'as pompé tu es juste une sale pute. Une sale pute une sale pute une sale pute une sale pute. [...] J'rêve de la pénétrer pour lui déchirer l'abdomen"

Le Ministre aurait donc pu se taire. Cela eut été sympathique qu'il fermasse sa gueule. Au lieu de cela, il ajoute: "Rimbaud a écrit des choses bien plus violentes et qui sont devenues des classiques. Je ne sais pas si les chansons d'Orelsan deviendront des classiques, mais en tout cas ce qui est certain c'est que c'est beaucoup d'agitation pour rien".

Pour rien? Doit-on rappeler au Ministre qu'en France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon ? Quand bien même le Ministre serait pressé de poser en défenseur de la liberté d'expression, était-il vraiment obligé d'ajouter qu'il n'y a "rien" de choquant dans ces paroles? Que s'agiter à leur sujet c'est s'agiter "pour rien" ? Etait-il obligé de comparer cette violence à celle de Rimbaud?

Au début Orelsan dit: "J'veux que tu tombes enceinte et que tu perdes l'enfant". Plus loin, cela devient: "J'vais te mettre en cloque (sale pute). Et t'avorter à l'opinel"
Il déteste "Les petites chiennes, les chichiteuses, les filles à problèmes", et de toutes façons "même si tu disais des trucs intelligents t'aurais l'air conne"
"Pétasse tu mériterais seulement d'attraper le DAS" Etc. Etc.

2 commentaires:

Philippe a dit…

Comme le note Fontenelle sur son blog:
Le même courageux Mitterrand qui l’autre fois prétendait que son ministère était celui de la protection des artistes, apparaissant pour ce qu’il est, « en appelle au sens des responsabilités des dirigeants de radios, de chaînes de télévisions et de sites Internet » pour les sommer de « ne pas diffuser » un clip où le rappeur Morsay « tient des propos intolérables (...) à l’encontre des forces de sécurité de notre pays » - propos dont la violence est en effet insoutenable, si l’on veut bien considérer que l’infâme violeur de consciences fredonne : « C’est Morsay, j’nique la police municipale »

Anonyme a dit…

Rien de choquant, oui et non. Pour quelqu'un qui réfléchit trente secondes, il n'y a rien de choquant. Sauf si à l'issue des trente secondes on prend toujours les mots pour les mots en eux-mêmes. Mais ça, ce n'est pas réfléchir.